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2021

Texte de Feng Xi

Texte de Feng Xi,
Critique d’art, Commissaire d’exposition, Chine

En 2017, lors de la deuxième saison internationale des arts et de nouveaux médias qui s’est tenue dans l’ancienne ville de Longli, dans la province du Guizhou, en Chine, j’ai rencontré Hervé Le Nost. L’oeuvre “ Lanterne sentinelle” a été spécialement produite pour l’exposition. Hervé Le Nost est doué pour découvrir le réel, la vie. Les matériaux et leur traduction dans une réorganisation de la forme dans des récits. Il a utilisé les tuiles des toits locaux du Guizhou et le principe de construction des maisons de bois, qui est un matériau auxiliaire important dans la construction des maisons. Ces deux matériaux sont les plus courants dans les bâtiments résidentiels du sud de la Chine, ils permettent de construire en un bâtiment, une maison traditionnelle. Le bois devient la principale structure du mur de support, tandis que les tuiles remplissent la surface du mur extérieur. Le rapport symbolique de l’usage architectural de la maison et sa fonction pratique d’abriter du vent et de la pluie ont été repensées et inversées dans la vie quotidienne.

La relation entre la symbolique des tuiles, en plus des fonctions d’utilisation, ajoute des ondulations visuelles et un intérêt supplémentaire. Comme dans beaucoup de ses œuvres, Hervé Le Nost est doué pour utiliser des formes rondes comme langage visuel important pour relier les œuvres. Dans « Lanterne Sentinelle », il a peint les murs intérieurs de la maison à trois faces qu’il a élaboré pour représenter la couleur rouge qui symbolise le pouvoir de la gouvernance, et des découpes circulaires y ont été ouvertes. Le public peut utiliser ce trou d’observation circulaire depuis l’extérieur comme de l’intérieur de la maison, pour adopter des comportements interactifs tels que le dialogue, le visionnement et les jeux. De l’extérieur, les cercles des murs se présentent sous la forme d’yeux et de bouches. La structure en bois sur la surface de la surface est formée par le « Ninzizi » et « Humanzi », qui produisent ensemble un visage de dessin animé, les expressions présentées comprennent une intrigue vivante et humoristique. Le toit conserve également une découpe circulaire, nous permettant de regarder le ciel bleu, les nuages blancs et le ciel nocturne de l’intérieur de la maison. En construction la perspective de l’architecture d’Hervé Le Nost a brisé la nature conventionnelle de la maison et a construit une maison qui n’était pas construite pour y vivre. L’espace a abandonné l’expérience domestique de la vie quotidienne, il met l’accent sur le langage de la communication interactive, de sorte que les personnes qui entrent sont également proches de la nature et du présent, de la vraie vie.

Le style de langage distinctif est très courant dans les œuvres d’Hervé Le Nost. Il aime observer à travers la réalité en combinant avec la pratique, la recherche sur l’histoire de différents pays et régions, comme structure de texte idéologique pour le raisonnement, il brise la logique physique des sculptures et des installations, pour ré-épisser les relations linguistiques contradictoires entre l’usage rationnel et irrationnel de l’existence qui forment l’existant. Une toute nouvelle forme avec un sens de l’humour et de l’ironie à la fois. En plus de l’intention professionnelle de l’esthétique et du style, il voyage. Sa méthode d’élaboration, dans ses résidences, etc. est la méthode d’une enquête, recherchant la réalité derrière les comportements quotidiens tels que la culture, la politique et la vie dans divers pays ou régions. La logique de survie, collectant des matériaux locaux pour la création créative, est un artiste qui comprend très bien le contexte local, et peut avec précision. La transformation de la réalité et de la logique créative en une relation d’existence raisonnable, formant un art qui est distinctement personnel et maintient une perspective uniqueSystème de terminologie

Les géants sont tombés

Éva Prouteau,
Critique d’art

Formes naturellement sculptées, traversées de rides et de sillons en surface, fourmillant de cavités semblant créer des chemins et percer des ouvertures, rugueuses et pétries d’anfractuosités, les Pierres de Lettrés n’ont ni les couleurs étincelantes des pierres précieuses, ni la douceur des galets zen : les Chinois qualifient de « qi » (bizarres) ces pierres torturées qui auraient le pouvoir de condenser les forces telluriques primordiales. Au fil de ses résidences en Chine, Hervé Le Nost s’est beaucoup intéressé à ces rochers étranges, qui sont considérés là-bas comme des êtres vivants, au même titre que tous les existants de l’univers. Pour imaginer son exposition à Thouars, l’artiste a greffé ce premier référent à d’autres histoires qui s’entrelacent, modus operandi récurrent chez celui qui aime opérer des connections logiques autant que syllogiques à partir de rencontres fortuites, de matières à sculpter, d’archives textuelles et de documents photographiques.

Hervé Le Nost imbrique ici divers éléments biographiques, à commencer par une lettre de son grand-père, écrite dans les années 1920 mais portée récemment à sa connaissance. L’homme y évoque des arbres qu’on abat, et emploie cette formule lapidaire animée d’un souffle tragique : « Les géants sont tombés ». À ce moment-là, l’artiste récupérait justement un grand chêne creux mort, qu’il avait quadrillé et débité avec l’idée d’en faire une pièce. Dans le processus de cristallisation qui préside à l’exposition, il faut inclure également l’intérêt d’Hervé Le Nost pour l’art baroque, et notamment pour ce palais de Te réalisé par l’architecte Giulio Romano, dont une salle spectaculaire s’orne d’immenses tourbillons peints : la fresque se nomme La Chute des Géants. À cet élan hélicoïdal irrésistible, l’artiste associe enfin une oeuvre plus récente, le Monument à la Troisième-Internationale de Tatline, une sculpture éminemment liée à son contexte politique, qui met en scène sa dynamique ascensionnelle, et soumet radicalement tout l’espace alentour à ses propres jeux de tension interne.

À partir de ces multiples composantes que l’artiste télescope mentalement selon des cheminements singuliers, le scénario d’exposition prend forme. Dans la chapelle saint-sulpicienne de Thouars, écrin minéral blanc traversé par le chatoiement des vitraux, Hervé Le Nost vient perturber, alléger et distordre l’espace monolythe. Dans une installation pensée comme une scénographie globale, il articule des réductions de paysages qui ménagent une perspective de promenade. Une forme — métaphore du projet de l’artiste — sert de fil rouge dans ce parcours ponctué de détails : une pièce de puzzle surdimensionnée, qui symbolise les processus d’emboîtement et l’image d’ensemble à recomposer, apparaît au sol à plusieurs reprises, alternativement socle et sculpture plate.

À la croisée des deux travées, une pièce monumentale s’élève vers le ciel : elle se compose des billots de chêne creux, qui laissent circuler le regard dans la matière évidée. Pour soutenir l’assemblage, un dispositif en forme d’escalier se déploie sur un vaste plateau, lui-même disposé sur de multiples tréteaux de bois. Élévation feuilletée, qui entrechoque les angles aigüs et les cercles de croissance, l’aplat pictural et la couleur naturelle du matériau brut, cette immense construction dialogue avec un polyèdre de papier délicatement suspendu dans les airs, astre géométrique qui parachève ce fragment de paysage de sa présence lunaire. Dans la poésie chinoise, la lune se manifeste majoritairement dans sa forme pleine : elle joue le rôle d’un cercle parfait qui aurait le pouvoir de réunir les êtres séparés. En écho, Hervé Le Nost suggère au visiteur l’idée que l’oeuvre ouvre un espace de partage, et cette exposition aurait bien pu s’intituler : avec qui vais-je regarder la lune ce soir ?

Spatialisés dans la travée centrale, différents pôles animent le paysage en archipel, instaurant des jeux d’échelle et de perspective. Un îlot central abrite une sculpture métallique qui rappelle les architectures métabolistes¹, d’autres sculptures en céramique viennent corroborer cette sensation de micro-univers autonomes, entre corps organiques, miniatures architecturales ou fragments insolites de paysage naturel. Hervé Le Nost adjoint à cet ensemble un leporello² d’images posées sur socles, des images qui sont traitées comme des sculptures puisqu’elles sont obtenues par transfert photographique sur émail et céramique, et fusionnent la texture du grès avec la matière visuelle. Ce livre accordéon révèle une autre facette de l’oeuvre d’Hervé Le Nost, sa fabrique intime du regard : il contient des montages photoshopés à partir des photographies réalisées quotidiennement, une réflexion sur sa pratique artistique, son travail de sculpture, ses repérages et ses archives. À Thouars, ces photographies s’agrègent au gré de jeux de communication baroques pour créer des natures mortes incongrues, que le motif de la bulle de bande dessinée vient traverser. Ces bulles, phylactères ou nuages, soulignent cette idée d’échange : elles codifient les flux entre les objets représentés, comme si les choses se parlaient ou pensaient les unes aux autres et qu’il était possible de saisir ces interactions mystérieuses.

L’une des caractéristiques du mouvement baroque est, essentiellement dans les arts figuratifs, la surabondance et la mise en abyme de plis : de là l’emploi par Gilles Deleuze³ de l’adjectif « baroque » pour désigner la philosophie de Leibniz, dans laquelle chaque personne serait grosse de tout l’univers et pourrait être figurée comme un immense réseau de plis qui, s’ils étaient dépliés, la représenterait tout entière. L’exposition d’Hervé Le Nost pourrait bien s’apparenter à un tel réseau : dans l’éclectisme des matériaux qu’elle met en oeuvre, dans l’empilement des temporalités distinctes mais reliées qu’elle convoque, dans la variété des paysages qu’elle nous invite à traverser, elle traduit la richesse d’une pensée qui n’en finirait pas de se déployer joyeusement, toujours attentive à la partition du monde qui l’entoure, à ses perspectives d’envolées comme à ses chutes.

1 – Le Mouvement métaboliste est un mouvement d’architecture originaire du Japon de l’après-guerre, qui met en rapport les megastructures avec les principes biologiques de la croissance. La petite structure d’Hervé Le Nost pourrait s’apparenter à un célèbre immeuble de Tokyo, emblématique de l’architecture métaboliste : la Nakagin Capsule Tower de Kisho Kurokawa.

2 – Le leporello, ou livre frise, est un livre qui se déplie comme un accordéon grâce à une technique particulière de pliage et de collage de ses pages. Le mot fait allusion à Leporello, valet de Don Juan, qui présente à Donna Elvira la longue liste des conquêtes de son maître, pliée en accordéon, dans le premier acte de l’opéra Don Giovanni de Mozart.

3 – Gilles Deleuze, Le Pli, Leibniz et le Baroque, Éditions de Minuit, 1988.

Légendes des oeuvres exposées à Thouars :

Oh les beaux jours !
Photos décalcomanies sur émail, 2021
Production : Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars
Verres réalisés au Centre international d’Art Verrier, Meisenthal, 2020
Production : ?
Porcelaines, grès et faïence émaillée, Faïencerie Henriot-Quimper, 2020
Production : ?
plateau et tréteaux en bois, 210 x 220 x 80 cm

Paysages flottants
Carton, porcelaine émaillée, porcelaine, papier, 2018
Production ?
Sur bois découpé en forme de puzzle, 290 x 174 x 105 cm, 2021
Production Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars

Les géants sont tombés
Chêne creux et chêne lamellé collé, bambou, médium, 300 x 367 x 190 cm, 2021 Production Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars

Collé-serré
Carton gris, carton-plume, carton alvéolé en nid d’abeille, photos décalcomanies sur émail, serre-joints en fonte et cuivre, 55 x 60 x 80 cm, 2021
Production : Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars

Avec qui vais-je regarder la lune ce soir ?
Plastique, miroirs, corde, porcelaine en impression 3D, métal, carton, tige en fibre de carbone, polystyrène, papier, médium, 445 x 420 x 365 cm, 2020-2021 Production : ?
Production Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars

Natures mortes ?
20 photos décalcomanies sur émail, bois, 30 x 40 cm, sur socle en médium, 2600 x 650 x 270 , 2021
Production Centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc, Thouars

Labellisé « centre d’art contemporain d’intérêt national » par le ministère de la Culture, le centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc de la Ville de Thouars bénéficie du soutien du ministère de la Culture – Drac Nouvelle-Aquitaine, du conseil régional Nouvelle-Aquitaine, du conseil départemental des Deux-Sèvres, de la délégation académique à l’action culturelle du rectorat de Poitiers. Le centre d’art a bénéficié des fonds européens FEADER dans le cadre du programme LEADER Nord Deux-Sèvres.

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Le centre d’art La Chapelle Jeanne d’Arc est membre de d.c.a / association française de développement des centres d’art, de Astre, réseau arts plastiques et visuels en Nouvelle-Aquitaine et de BLA!, association nationale des professionnels de la médiation en art contemporain.

Graffitis en trois dimensions

Iam Yang,
Critique, Artiste Commissaire

J’ai rencontré Hervé Le Nost dans une ancienne faïencerie en Bretagne. Notre groupe de quatre personnes venait d’arriver à Quimper où il organisait justement une exposition pour sa résidence dans cette manufacture de faïence. Les couleurs des engobes émaillées de ses céramiques laissaient transparaître une certaine liberté désinvolte, des allusions riches de sens cachés, comme les murmures d’un poète ou des graffitis réalisés par une main assurée.

À la différence que les graffitis d’Hervé sont fabriqués à partir de matériaux multiples : ils sont en trois dimensions. Le plus souvent, ce sont des visages humains. Ils évoluent avec une désinvolture extrême à l’extérieur de tout autre style. Ils sont sobres comme des symboles, et semblent concentrer des éléments spirituels invisibles issus de traditions diverses.

Par la suite, j’ai pu admirer différentes évolutions d’Hervé dans cette direction : ces lanternes étranges faites de verre et de céramique, ces traits tissés à partir de bambous à Hangzhou et l’espace architectural de près de quatre mètres fait de briques et de bois qu’il avait installé à Longli dans le Guizhou. C’était un gigantesque visage de soldat. Mais, de loin, on y voyait toujours la liberté, la jubilation indicible et cette pointe de sarcasme qui sont l’essence même du graffiti.

Texte de Wang Dong

Texte de Wang Dong,
Conservateur Musée de Shenzhen, critique d’art, commissaire, Chine

En tant qu’artiste, la rencontre avec Hervé a d’abord eu lieu à Longli International New Media Art Festival. Pendant l’échange avec lui, je sens de plus en plus qu’un tel artiste avec une riche expérience a des médias et des matériaux créatifs si riches, Cette perspective unique n’est pas le dualisme traditionnel des «choses», ni la confrontation entre différentes origines et cultures. Vision et imagination, mais sa vision unique de la vie et de la vie quotidienne en tant qu’excellent artiste. Observation, perception nuancée et exploration continue des limites de l’art de la sculpture.

En tant qu’artiste plasticien français qui continue d’accorder une grande attention aux matériaux de l’art, Hervé Le Nost Au cours des dernières années de création artistique, les sculptures et les images ont été utilisées comme principaux moyens de création, et essayent d’utilise Une clé pleine de magie, explorant la transformation et le lien entre les récits bidimensionnels et tridimensionnels, puis présentant une expression artistique poétique. Derrière cette riche vision d’image, tout révèle dans la «sculpture» d’Hervé Le Nost que La compréhension de soi et la recherche de ce langage artistique traditionnel mettent également en évidence sa riche expérience de vie, son expérience personnelle sa mémoire. Parmi ses créations artistiques, il y a une oeuvre étroitement liée à la vie réelle, “Le tourbillon de la vie », et la pièce « Ile » liée à la nature, et le travail “arret sur Image », qui est emprunté au cinéma. Le médium de ses créations artistiques implique la sculpture, la photographie, l’installation et des matériaux créatifs qui sont directement liés à notre vie quotidienne. Des relations divisibles entre fil, carton, mousse, plastique, céramique, verre, etc. L’art est toujours issu de la vie réelle, ce n’est pas uniquement que les créations d’Hervé sont diverses et riches, mais que ses créations artistiques sont en réalité le reflet et le saut d’un esprit intéressant qu’il porte en lui.