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Publications

Graffitis en trois dimensions

Iam Yang,
Critique, Artiste Commissaire

J’ai rencontré Hervé Le Nost dans une ancienne faïencerie en Bretagne. Notre groupe de quatre personnes venait d’arriver à Quimper où il organisait justement une exposition pour sa résidence dans cette manufacture de faïence. Les couleurs des engobes émaillées de ses céramiques laissaient transparaître une certaine liberté désinvolte, des allusions riches de sens cachés, comme les murmures d’un poète ou des graffitis réalisés par une main assurée.

À la différence que les graffitis d’Hervé sont fabriqués à partir de matériaux multiples : ils sont en trois dimensions. Le plus souvent, ce sont des visages humains. Ils évoluent avec une désinvolture extrême à l’extérieur de tout autre style. Ils sont sobres comme des symboles, et semblent concentrer des éléments spirituels invisibles issus de traditions diverses.

Par la suite, j’ai pu admirer différentes évolutions d’Hervé dans cette direction : ces lanternes étranges faites de verre et de céramique, ces traits tissés à partir de bambous à Hangzhou et l’espace architectural de près de quatre mètres fait de briques et de bois qu’il avait installé à Longli dans le Guizhou. C’était un gigantesque visage de soldat. Mais, de loin, on y voyait toujours la liberté, la jubilation indicible et cette pointe de sarcasme qui sont l’essence même du graffiti.

De la sculpture au cinéma et du cinéma à la sculpture

présentée par Hervé Le Nost, sculpteur.

“Depuis 1983, mon travail est un emboitement de séries. Une réflexion sur ce que peuvent être les gestes de la sculpture ou ses constituants. AvecArrêts sur imageje tente de mettre en place une observation au sens premier du terme. J’ai remarqué que les réalisateurs utilisent fréquemment des substituts au récit, aux plans, au jeu des acteurs. Ce sont des objets, des scènes métaphoriques, un clip dans un film. Ces éléments sont pris hors du récit comme le verre de lait dans “soupçon“ de Hitchcock, le lustre du “Salon de musique“ de Satyajil Ray, les origamis dans “Blade Runner“.

Cette nécessité à faire un renvoi pour mieux plonger à nouveau dans les paramètres du récit, ces éléments visuels étayent le récit. Buñuel dans “l’âge d’or », Cocteau dans “Le testament d’Orphée“, ont utilisé l’image métaphorique qui, sur le principe surréaliste, fait sens de toute façon. Tati et Godard en font aussi usage sous une forme plus construite en fonction du récit.

Cet ensemble sous le regard d’un plasticien devient une galerie virtuelle de possibles oeuvres égarées dans la mobilité lumineuse des films et des séquences. Je propose une déambulation d’objets à métaphores, de films en films. Les repérages dans la source que m’offre le cinéma me permettent d’effectuer un choix d’oeuvres à reproduire en volume.

Ceci est un travail de sculpteur dont les sources s’extirpent du cinéma, qui n’a eu de cesse tel Pygmalion de donner vie à des statues (Métropolis, Méliés, Robocop).“

Hervé le Nost

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Texte Sylvie Couderc

Sylvie Couderc
Critique d’Art,
in catalogue « Résidences d’art en Dordogne » 1999
ref. Galerie Monpazier résidence

« … L’artiste a quitté l’espace intîme de l’atelier pour exposer ses réalisations dans la cité, non plus en galerie ni au musée, mais dans des espaces partagés par tous. Et l’exercice du partage est bien ici la question posée, qu’il s’agisse pour les arts plastiques de se départager des cultures de masse, tout en subissant la concurrence. Il s’agit aussi de concerner un public davantage acquis au spectaculaire qu’aux événements « infra-minces » – pour citer une terminologie chère à Duchamp- provoqués par l’art contemporain dans l’espace social. Eu égard à ce contexte, Hervé Le Nost agit à Monpazier à la manière des gens du voyage, en éphémère, la leçon d’art à laquelle il nous convie étant moins démonstrative que divertissante. Considérons ici que l’un des premiers sens du divertissement n’est pas forcément celui de l’amusement mais signifie l’intention de détourner, de se tourner d’un autre côté, acte parfaitement concrétisé et assumé à Monpazier, le temps de cette exposition… »

Texte de Lieven Van Abeele

Lieven Van Abeele,
Commissaire, Critique d’Art
in « Ile , Ex voto » 1995
ref galerie Ex voto + centre d’art de vassivière ile terre eau ciel

« … A Vassivière , il rassemble son travail autour de l’idée d’île. ».. » L’île artificielle devient une métaphore pour une réflexion autour de la nature de l’art, concrétisée par une série de sculptures qui reprennent la forme de l’île, en bois, en granit, en acier, en bronze, en porcelaine, en gazon et en lampes électriques . Hervé le nos renonce à l’assemblage, à la décontraction et à l’analyse pour reprendre des formes monolithiques en matériaux classiques dans une synthèse de l’art et de la nature.Par les citations des matériaux, chaque pièce fait référence à la sculpture d’une période de l’humanité bien délimitée: de l’âge de pierre à l’époque postmoderne. Ici, l’artiste veut se ressourcer dans l’histoire de la sculpture , en reprenant les stades les plus importants de son évolution…« 

Texte de Véronique Goudinoux

Véronique Goudinoux
Commissaire
in catalogue  » A Stroetman » 1991
ref .Galerie Emsdetten « à Stroetman »

« … A mille lieux des pratiques nord-américaines de l’objet de consommation dont elles se rapprochent parfois, autre tromperie, par leur mode de présentation, les pièces de Le Nost évoquent une tout autre classe d’objets ( sans doute aussi présente dans l’univers de chacun que celle de l’objet usuel), classe formée par les images et objets populaires…Ces objets se distinguent le plus souvent par leur dispositif emphatique, « baroquisant », de représentation; car plus que l’objet lui-même, c’est la place qu’on lui accorde et sa valeur de signe qui sont mis en scène. Les pièces de Le Nost intègrent cette donnée: la fonction de représentation n’est pas assumée simplement par divers éléments aisément repérables…mais elle est redoublée, comme mise en abîme dans chacune des pièces qui peut-être perçue comme un présentoir, comme l’instrument qui donne à voir un autre élément…Les effets d’incertitude, de distanciation et de décalage évoqués ci-dessus sont à cette pratique du redoublement… « 

Bernard Lamarche Vadel, critique

Les premières sculptures de Hervé Le Nost furent présentées en 1984 dans l’exposition « Ouvrir en beauté » organisé par Bernard Lamarche Vadel. Il s’agissait alors de grands assemblages en spores taillé sur lesquels l’artiste distribuait des écoulements de peinture. Ce groupe de sculptures dont la conception s’étend jusque’à la fin de l’année 1985 doit être situé sur la ligne de l’expressionnisme abstrait, influencé par De Kooning. À cette époque, Gabrielle Maubrie présenta à l’occasion d’une exposition collective dans sa galerie de l rue du Dragon.

À partir du début de 1986, Hervé Le Nost se dégage des nécessaires influences de ces débuts. S’il poursuit son travail dans le sens de l’assemblage jusqu’à l’échelle monumentale dans certaines pièces, ces dernières oeuvres s’inscrivent à la confluence de registres, tel que le mobilier, l’architecture, les Pardons, pour y manifester la surdétermination de l’assemblage dans le sens d’une distribution spatiale, hiérarchisée par une forte structure d’étagement. Ainsi s’organise le dialogue entre les motifs disséminés sur une sculpture pensée en terme de socle et présentoir du farfelu à l’état pur.